Le vrai problème du chômage

Le peuple est invité à se prononcer, le 26 septembre prochain, sur la modification de la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (LACI)1

La presse quotidienne, les hebdomadaires, la radio et la télévision ont eu largement le loisir d’exposer respectivement à leurs lecteurs, auditeurs et téléspectateurs les détails de la loi modifiée, ce qui subsistera et ce qui changera, ainsi que les arguments du Conseil fédéral et des Chambres, de même que les arguments des opposants responsables du référendum.

Contentons-nous donc de rappeler que la situation financière de l’assurance-chômage est devenue si critique, à cause d’une sous-évaluation du taux de chômage probable, que le Conseil fédéral est obligé, de par la loi2 d’augmenter la cotisation.

Celle-ci sera donc augmentée, dans le projet, de 2 à 2,2 % jusqu’au salaire annuel de 126'000 francs. En outre, et c’est nouveau, on prélèvera une cotisation dite «de solidarité» de 1 % sur les salaires situés entre 126'000 francs et 315'000 francs par an.

Pourquoi s’arrêter à 315'000 francs, soit deux fois et demi le montant maximum du gain assuré? C’est aussi la loi qui l’impose3 dans un article entré en vigueur le 1er juillet 2003 que les référendaires semblent découvrir aujourd’hui. En tout état de cause, cette contribution «de solidarité» n’a plus le caractère d’une assurance, mais c’est manifestement un impôt.

Cette partie du projet, qui devrait rapporter à la Confédération quelque 643 millions de francs, n’est en somme pas contestée par le comité référendaire.

Ce qui a motivé le référendum, c’est la deuxième partie de la révision. Celle-ci prévoit, outre l’augmentation limitée des cotisations, une diminution des prestations.

Ceux qui ont cotisé durant au moins un an pourront toucher des prestations durant un an (actuellement un an et demi) par exemple. Les personnes dispensées des conditions relatives à la période de cotisation (c’est-à-dire qui n’ont pas cotisé) pour cause de maternité, de formation, de maladie, notamment, recevront des prestations pendant quatre mois (actuellement pendant un an).

Les citoyens qui ont soutenu le référendum voient dans cette diminution des prestations un démantèlement de l’Etat social, une attaque contre les plus démunis. Un risque existe que les exclus de l’assurance-chômage fédérale viennent grever les budgets cantonaux et communaux des services sociaux.

En réalité, la véritable faiblesse de notre système d’assurance-chômage est ailleurs. Ce n’est nullement en allongeant les périodes de prestations qu’on aidera les chômeurs à retrouver un emploi. C’est même l’inverse qui est vrai. Plus le chômeur subit de semaines et de mois d’inactivité et plus il se décourage. Après une année de chômage, il ne retrouvera miraculeusement un emploi que dans la semaine qui précède la fin de son droit aux prestations.

Ce qui péjore ses chances, outre la trop longue durée des prestations (qui l’habitue à l’inaction ou qui décourage ses tentatives), c’est la profonde et dramatique incompétence des organes étatiques chargés de son assistance au reclassement. Les collaboratrices des offices régionaux de placement sont généralement des assistantes sociales pleines de bonne volonté et d’humanité, mais qui n’ont pas la formation administrative et juridique nécessaire à la défense des droits de leurs «clients», et qui n’ont pas la moindre formation dans la «vente» de leurs compétences aux entreprises de la place.

Il faut avoir, comme chef d’entreprise, reçu des curriculum vitae transmis par des ORP, truffés de fautes d’orthographe, sans photographie, sans copie de diplômes et de certificats, avec un petit mot de l’assistante sociale nous assurant que son protégé est un type «super» pour mesurer qu’aucun chômeur n’aura une seule chance de retrouver un emploi en étant coaché de cette manière.

La diminution des prestations, qui devrait rapporter 622 millions de francs par an à la Confédération, sera une mesure encore insuffisante – quoique nécessaire – si elle ne s’accompagne d’un effort important dans la formation des collaborateurs des ORP. Il ne suffira pas de leur offrir le certificat de spécialiste en ressources humaines. Il faudra des femmes et des hommes aux compétences rares et variées, qui ne seront pas payés au nombre de chômeurs de leur département, mais à la rapidité avec laquelle ils ou elles leur auront trouvé un emploi stable.

Claude Paschoud

1 RS 837.0

2 Art. 90c LACI

3 ibid.

Thèmes associés: Politique fédérale

Cet article a été vu 3722 fois

Recherche des articles

:

Recherche des éditions