Escamotage

Dans le Nouvelliste du 4 février 2009, sous la rubrique L’invité, le cardinal Henri Schwery aborde la question de l’évolution darwinienne pour affirmer, sur la base d’une mise au point du pape Léon XIII (1), qu’elle n’est pas en contradiction avec la Révélation divine correctement comprise: «La foi au Dieu créateur n’implique aucun choix nécessaire entre fixisme et évolutionnisme.»

Le problème, c’est que Darwin affirmait l’origine animale de l’homme et que cette façon d’expliquer l’origine de notre espèce, tout en négligeant totalement la question du chaînon manquant pour pallier la discontinuité du passage de l’espèce animale à la nôtre, implique la négation de la création de l’âme directement par Dieu, fondement incontournable de la dignité de tout être humain. En cela, précisément, le darwinisme est incontestablement hétérodoxe!

C’est du reste ce qu’enseignait le pape Pie XII, que le cardinal valaisan omet (intentionnellement?) de citer ici:«(…) ne se comportent-ils pas comme si l’origine du corps humain à partir d’une matière déjà existante était à cette heure absolument certaine et pleinement démontrée (…) comme si rien dans les sources de la Révélation divine n’imposait sur ce point la plus grande prudence et la plus grande modération?» (2) Cette prudence et cette modération font totalement défaut au cardinal extrémiste de Sion, qui ne dit rien non plus du rejet, au nom de la Révélation elle-même, du polygénisme…

Typiquement moderniste est au reste sa conclusion: «La Révélation biblique (…) est parole de vie, de vie surnaturelle (…) que la raison ne connaît pas par elle-même.» Certes, mais avec cette précision nécessaire et toujours passée sous silence par la secte: «L’origine divine de la religion chrétienne peut se prouver avec les seules lumières naturelles de notre raison.» (3)

Henri Schwery dit se réjouir «comme théologien et comme scientifique» de l’éloignement actuel de ces polémiques «pseudo-scientifiques et pseudo-religieuses». Ces propos ne prouvent qu’une chose, ou plutôt deux: ignorant le naturalisme matérialiste et athée du naturaliste anglais, H. Schwery démontre qu’il est à la fois un homme de science très approximatif et peu sérieux, et un théologien passablement nébuleux! Il est vrai que sa qualité de cardinal l’autorise à se donner chez des provinciaux des qualités non démontrées. Le quotidien du Valais est tout disposé à les lui reconnaître sans examen.

O vanité, qui donne à ce monde petit l’illusion de la sagesse et de la science même quand c’est la stupidité la plus évidente qui s’exprime!

«Une de mes premières mésaventures de jeune journaliste advint à propos d’un livre de Grant Allen intitulé L’évolution de l’idée de Dieu. Chargé d’en rendre compte, j’émis l’idée qu’un livre signé Dieu sur L’évolution de l’idée de Grant Allen aurait été beaucoup plus passionnant. Je n’oublierai pas de sitôt le ton attristé de mon rédacteur en chef lorsqu’il me fit remarquer le tour blasphématoire de cette remarque.» (4)

NOTES:

1) Encyclique Providentissimus Deus du 18 novembre 1893 sur l’enseignement de la Bible.

2) Encyclique Humani generis du 12 août 1950.

3) Ibid.

4) Chesterton: L’homme éternel, première partie: L’homme dans sa caverne.

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