Servir Dieu non dans la vérité... (réponse à Vincent Pellegrini 1)

            Tout le monde connaît le dicton «c’est au pied du mur que l’on connaît le maçon». Les professions de foi théoriques n’engagent que ceux qui les écoutent. La démocratie moderne par ses représentants en est très consciente, et c’est la raison pour laquelle toute profession de foi qu’elle sait ne devoir être que théorique ne l’importune guère, sauf s’il s’agit de réduire à néant un adversaire politique dangereux pour elle. Le PDC n’inquiète plus les démocrates modernes depuis longtemps. Serait-ce parce que ses professions de foi en politique sont plus théoriques que pratiques? Jugeons-en sur la base de l’article de M. Pellegrini auquel nous nous référons ici. Les références qu’il nous donne paraissent absolument imparables: un prédicateur brésilien se référant explicitement à «Benoît XVI» et ce dernier en personne. Quoi de plus sûr? Voire…

 

            1.         «L’Eglise n’a pas de candidats à elle.» Mais là n’est pas la question! L’Eglise a des fidèles, qui lui doivent obéissance, et quel que soit leur rang dans l’Etat. L’Eglise a mission de diriger leur conscience à tous, sans distinction et jusque dans l’exercice pratique de leur fonction, que celle-ci se limite à élire ou qu’elle consiste à exercer une magistrature, une charge publique. L’observation du prédicateur brésilien est délibérément imprécise. Pourquoi?

 

            2.         «Les candidats œuvrant au bien commun doivent être proches des valeurs que défend le pape Benoît XVI et qu’il considère comme non négociables.» Pourquoi «proches» et non «fidèles»? Car on peut être proche et infidèle à des valeurs. Nouvelle ambiguïté trahissant peut-être un manque de sincérité?

 

            3.         Sur ces valeurs précisément – le respect de la vie humaine de la conception de celle-ci à la mort naturelle, le mariage monogame indissoluble et unissant exclusivement deux personnes de sexes différents, et la liberté des parents d’éduquer leurs enfants sans interférence de l’Etat: «Benoît XVI» ajoute à ces valeurs le Décalogue2.

 

            Compte tenu de la nature et des pratiques du régime démocratique moderne, notamment du multipartisme, aucune de ces valeurs ne peut être prise véritablement au sérieux chez les chrétiens, à la fois comme électeurs et candidats à des charges publiques, même seulement administratives, si ne s’y ajoute l’exigence de la clause de conscience sur l’application de lois contraires à ces valeurs non négociables. Or le texte de M. Pellegrini n’en parle pas… Etrange, tout de même! Car, à défaut d’une telle clause, les chrétiens peuvent-ils réellement appliquer dans leur vie pratique, professionnelle notamment, ces valeurs soi-disant non négociables? Certainement pas! Exemples:

 

            1.         Un médecin ne peut pratiquer un avortement, non plus qu’un établissement hospitalier sous direction démocrate-chrétienne. Est-ce le cas en Valais? Vincent Pellegrini n’en parle pas…

 

2.    Un juge issu de la démocratie chrétienne ne peut prononcer un divorce, malgré la loi civile lui en faisant occasionnellement un devoir, en particulier lorsqu’il y a union sacramentelle devant l’Eglise catholique, à la seule exception d’une perspective de demande  de nullité devant les instances religieuses compétentes. Vincent Pellegrini n’en parle pas non plus… Etrange!

 

            3.         La loi sur l’instruction publique prévoit-elle une clause de retrait des enfants mineurs à l’initiative de leurs parents, pour tous les cours susceptibles de porter le trouble dans leur formation morale chrétienne? Toujours le même silence de M. Vincent Pellegrini…

 

            4.         Les officiers d’état civil chrétiens seraient-ils contraints d’enregistrer des mariages unisexes? Sans clause libératoire de conscience, c’est plus que certain. M. Vincent Pellegrini n’en parle pas…

 

            Dans ces conditions, que penser de son texte? Des mots, rien que des mots. Rappeler des principes, c’est bien, mais un pasteur fidèle au Christ doit dans les circonstances actuelles y ajouter la conséquence pratique incontournable, la clause de conscience, faute de quoi ni les uns ni les autres «ne servent Dieu dans la vérité».

 

            Si le problème ne se pose pas au niveau des élections locales et communales, il se pose incontestablement non seulement au niveau fédéral mais aussi au niveau cantonal.

 

Michel de Preux

 

 

 

 

NOTES:

[1] Le politicien chrétien, Nouvelliste du vendredi 14 septembre 2012, p. 4, rubrique Cavalier seul.

[2] Voir son discours du 8 septembre 2012.

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