Reniements
Il a déjà été question ici du cruel dilemme qui saisit l’Occident lorsque deux communautés «protégées» s’affrontent et nous somment de choisir notre camp.
Dans le conflit israélo-arabe, notre camp semble aujourd’hui choisi: la cause palestinienne, longtemps réservée à l’extrême-gauche, s’est progressivement imposée; le soutien au monde arabe et la condamnation morale d’Israël sont désormais la norme. Pourquoi? Peut-être parce que les juifs apparaissent décidément trop proches de notre civilisation et ne nous permettent pas d’assouvir notre fantasme d’adoration du «bon sauvage». Peut-être aussi, plus prosaïquement, par un réalisme mêlé de peur, car la démographie exponentielle des musulmans leur donne maintenant l’ascendant du nombre.
La guerre du Mali provoque aujourd’hui une situation nouvelle et plus délicate: ce sont cette fois des Africains noirs qui se battent contre des Arabes. Nous autres Européens n’avons pas l’habitude de traiter différemment ces deux populations: nous leur accordons les mêmes droits de victimisation, de revendications communautaires, d’accès privilégié à nos aides sociales et de colonisation progressive de certains quartiers. Les règlements de comptes entre clans maghrébins et africains ne sont jamais médiatisés. Nous parlons globalement des «personnes issues de l’immigration» et n’envisageons jamais d’opérer des distinctions, encore moins de décréter que les uns sont «bons» et les autres «mauvais». Pourtant, l’intervention militaire française au Mali, plus ou moins soutenue moralement par les déclarations d’autres chefs d’Etat européens, nous force brusquement à prendre parti: les populations arabes hurlent au racisme parce que la France vole au secours des Maliens, tandis que ces derniers cessent de hurler au racisme pour applaudir avec reconnaissance l’aide française.
Avons-nous vraiment choisi les Africains contre les Arabes? Ce soutien est-il assumé par nos élites intellectuelles? On sent celles-ci, d’habitude si sûres d’elles, hésiter. La cause malienne leur paraît suspecte par ce seul fait qu’elle est défendue par des blancs; c’est peut-être pour cela que nos journalistes passent au crible moral le comportement de l’armée malienne – davantage que celui des insurgés de Syrie. En même temps, la cause islamiste, certes jamais ouvertement encensée, semble profiter d’une sorte de fascination respectueuse dans nos médias – on pense ici à la manière dont la prise d’otage d’Algérie a été présentée comme un «succès» et à la fierté du quotidien 24 heures d’avoir un «interlocuteur privilégié» parmi les terroristes. Une fois de plus, lorsque nous ne savons pas où aller, la haine de notre identité et de nos intérêts semble hélas nous servir de boussole.
Les choses ne s’arrêteront pas là. Aujourd’hui déjà, en Grande-Bretagne, des milices islamiques patrouillent dans certains quartiers pour en chasser les non-musulmans et invectiver en particulier les homosexuels qui s’y aventurent. Les imams locaux disent condamner cette intolérance… en attendant que les habitudes s’installent et que ces comportements ne fassent plus de vagues. L’intelligentsia occidentale, après avoir renié son soutien aux juifs et aux Africains, acceptera-t-elle alors cette ultime humiliation de devoir tolérer des zones d’homophobie dans les villes européennes?
Pollux
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