L'histoire s'écrit sous nos yeux

Tant de choses sont dites chaque jour sur l’Ukraine que ce sujet risque de fatiguer même les lecteurs les mieux disposés. Pourtant, ces événements se révéleront peut-être importants pour l’avenir de notre continent, car c’est la première fois depuis longtemps que se déroule aussi près de nous une confrontation quasi directe entre «l’Est» et «l’Ouest».

Ce qui est sûr, c’est que c’est bien une guerre qui a éclaté. Non pas une guerre militaire – car les soldats russes en Crimée ont été jusqu’ici accueillis pacifiquement, aucun média n’ayant pu faire état du moindre affrontement – mais une guerre de l’information. De part et d’autre, on choisit ce que l’on veut dire, comment on veut le dire et comment on veut l’illustrer. Ce qui n’empêche pas certains faits de rester incompréhensibles ou mystérieux.

Cette guerre de l’information et les traces importantes que promet de laisser la crise ukrainienne nous inspirent cette réflexion intéressante: nous assistons quasiment en direct à l’écriture d’une page de notre histoire.

La question est de savoir qui l’écrit et comment. Les lecteurs du Pamphlet savent qu’un décalage important peut exister entre la manière dont certains faits historiques sont rapportés dans les livres, et celle dont ils se sont réellement passés. A un moment ou à un autre, certains éléments ont été écartés, ou au contraire amplifiés, voire déformés. Avec les événements d’Ukraine, nous vivons ce processus au jour le jour. Des dizaines de faits nous sont rapportés quotidiennement par les médias, souvent présentés et interprétés différemment à l’Est et à l’Ouest. Au moment où nous en prenons connaissance, nous ne savons pas quelle est leur importance aujourd’hui ni quelle sera leur importance par rapport à la suite, et nous ne savons pas si l’histoire les retiendra ou non. Mais nous, nous pouvons les retenir – que ce soit en classant des coupures de journaux, en enregistrant des pages publiées sur internet, ou simplement en gardant en mémoire tout ce que nous lisons. Nous ignorons aujourd’hui à quoi cela servira, mais il sera certainement intéressant, d’ici quelques mois ou quelques années, de confronter ces archives et ces souvenirs à l’«histoire officielle» qui se sera imposée – ou qui aura été imposée.

En ce sens, l’énorme quantité d’informations à laquelle nous avons actuellement accès, notamment à travers internet, peut certes faire courir le risque de s’y perdre, mais elle constitue aussi, pour celui qui sait s’en servir et trier ce qui l’intéresse, un outil fascinant et nouveau pour corriger si nécessaire l’histoire officielle.

Pollux

Thèmes associés: Politique internationale

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