Démagogues chrétiens

«Il a été donné à l'homme de renverser les murs les plus solides (…) mais il ne lui a pas été donné de suspendre pour un jour, pour une heure, pour un instant, l'accomplissement infaillible des lois fondamentales du monde physique et du monde moral.»

Donoso Cortès: Essai sur le catholicisme, le libéralisme et le socialisme, conclusion.

En recherche d'équité fiscale pour les familles, le PDC veut faire bénéficier les couples mariés des mêmes avantages fiscaux que ceux qui ne le sont pas. A cette fin, il tente d'introduire dans notre Constitution une définition du mariage. Les temps ne s'y prêtent pas, car la notion même de mariage est censée avoir évolué!... Ainsi une tentative de modification constitutionnelle risque-t-elle de rallumer la querelle sur la reconnaissance des couples dits de même sexe. Que révèle cette impasse? Une grave méconnaissance de ce qu'est la démocratie moderne, en totale rupture avec son homonyme traditionnel. Celle-ci, comme toutes les autres formes de régime politique, admettait l'existence de lois morales universelles, connues par la raison, quand bien même elles sont, en milieu catholique, confirmées par la foi et, à  ce titre, rendues plus sûres contre l'erreur.

La démocratie sécularisée refuse ce genre de confirmation et, son libéralisme aidant, voici qu'elle est en train de perdre aussi le repère naturel de la raison!

Les démocrates-chrétiens sont, on le sait, ralliés à la démocratie dans le sens moderniste du terme et, conséquents avec leur erreur de départ, ils cherchent l'équité fiscale des couples mariés en voulant les traiter sur ce plan comme les couples non mariés! Dans leur superficialité, ils ont oublié que, dorénavant, une telle distinction est obsolète et que la notion de couple ne devrait plus avoir de rapport nécessaire avec la différence sexuelle. Cette difficulté inattendue à laquelle se heurte leur tentative de modification constitutionnelle les met en face de leurs propres contradictions.   

Peut-on, en effet, chercher l'équité, en quelque domaine que ce soit, en confondant dans un même traitement juridique des formes de vie à deux sans égard à la moralité? Si les démocrates-chrétiens avaient gardé un sens moral rigoureux, ils auraient cherché à infléchir la pratique fiscale dans le sens inverse de celui qu'ils prétendent consacrer aujourd'hui, c'est-à-dire à faire bénéficier d'avantages fiscaux les seuls couples mariés selon les normes de droit naturel. Ils ne l'osent plus, compte tenu de l'état des mœurs. Démagogues, ils cherchent l'équité fiscale là où la démocratie moderne la met, c'est-à-dire dans la manipulation qu'elle en fait. Mais ils ont, sur ce terrain, plus forts qu'eux…

Je doute pourtant qu'ils en tirent une leçon utile pour rectifier leur propre erreur initiale et, par là, ils démontrent qu'en abandonnant les principes moraux universels, ils font de la référence chrétienne de leur parti un simple slogan électoral, plutôt cynique.

Michel de Preux

Thèmes associés: Egalité, discriminations - Politique fédérale - Société

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