Il ne faut pas tout mélanger

Les agressions, souvent à caractère sexuel, qui ont marqué la Saint-Sylvestre dans plusieurs villes d'Allemagne et d'ailleurs ont soulevé une émotion d'autant plus intense qu'il a bien fallu reconnaître, finalement, qu'elles étaient, pour le plus grand nombre, le fait de «migrants».

Puisqu'il n'était pas possible de nier la réalité, autant valait exploiter le filon jusqu'au bout. C'est ainsi que le «témoignage» d'une jeune Saint-Galloise a trouvé une oreille complaisante à la rédaction de 20 minutes, qui nous a servi, le 6 janvier, une bonne louche de récit horrifique.

En bref, la jeune femme et une de ses amies, qui fêtaient l'an neuf à Hambourg sur la Reeperbahn, auraient décidé, vers deux heures du matin, de se rendre dans un club en passant par une rue parallèle à la fameuse artère, «axe principal du célèbre quartier des plaisirs de la ville hanséatique», comme le dit pudiquement Wikipédia. Elles auraient alors été encerclées par «plein d'hommes» qui «avaient tous le teint un peu foncé» et «ne parlaient pas bien l'allemand». Ceux-ci les auraient passablement malmenées. Pour finir, elles auraient réussi à s'enfuir et à regagner la Reeperbahn. A noter qu'elles auraient renoncé à alerter un des agents de police présents sur les lieux, «estimant que les forces de l'ordre avaient suffisamment à faire ce soir-là» – plus probablement, par crainte d'une sévère réprimande pour s'être aventurées sans protection dans les rues d'un quartier chaud.

Si les choses se sont déroulées comme on nous le raconte, ce qui est arrivé à ces deux donzelles est dû à leur imprudence et à leur sottise. Cela n'excuse pas le comportement des agresseurs, certes, et on peut déplorer que des mères n'expliquent plus à leurs filles qu'il est dangereux de se rendre dans certains endroits. Mais cela n'est pas comparable, par exemple, avec ce qu'ont subi, en raison d'une attaque planifiée et coordonnée, les femmes qui fêtaient la Saint-Sylvestre à Cologne près de la gare centrale et de la cathédrale.

En établissant clairement un lien entre ces événements, 20 minutes se moque du monde et participe directement à la stigmatisation des «migrants».

M. P.

Thèmes associés: Coups de griffe - Immigration - Médias

Cet article a été vu 3428 fois

Recherche des articles

:

Recherche des éditions