Minarets

Tout le monde est conscient que le débat sur les minarets cache en réalité autre chose.

Les minarets n’ont aucune importance et ne sont qu’un révélateur pour les deux partis engagés dans le débat.

Mais le débat ne peut avoir lieu franchement: l’article 8 de la Constitution fédérale proclame en effet que «nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d’une déficience corporelle, mentale ou psychique».

De l’interdiction constitutionnelle de la discrimination, on aboutit aisément à l’incrimination de tout discours révélant une crainte de l’islam, ou une opposition politique à l’invasion allogène, en vertu du fameux article 261bis du Code pénal qui réprime celui qui aura, «publiquement, incité à la haine ou à la discrimination envers une personne ou un groupe de personnes en raison de leur appartenance raciale, ethnique ou religieuse».

Une affiche proclamant «NON aux minarets» veut faire passer, à l’évidence, un autre message, qui pourrait être, au choix : «NON à l’invasion de l’Europe par les musulmans» ou «NON à une religion obscurantiste et sexiste» ou encore «NON aux terroristes islamistes» ou enfin «NON à ce voyou de Kadhafi».

Dans la plupart de ces autres discours sous-jacents, on peut humer un léger fumet de discrimination, laquelle était, selon mon dictionnaire Littré, la faculté de discerner, de distinguer, et, selon le psychologue Théodule Ribot, le fondement de notre intelligence, mais qui est devenue un objet de scandale sous l’empire du «politiquement correct».

Quand les bons apôtres qui veulent croire et nous faire croire à la cohabitation pacifique de toutes les religions nous parlent des minarets, ils évoquent parallèlement les clochers des églises, ils plaident la liberté des cultes, la paix confessionnelle, la laïcité de l’Etat et la différence selon eux essentielle entre l’islam et l’islamisme.

Qu’ils soient de bonne ou de mauvaise foi, ces discours sont trompeurs. Les minarets sont la partie émergente, aujourd’hui, d’une opération plus vaste d’islamisation conquérante de l’Europe.

Face à ce mouvement formidable, les chrétiens se terrent frileusement. Les descendants de Charles Martel baissent les yeux et changent de trottoir. Même les théologiens protestants prêchent le repli honteux: «Si je crois en Jésus, faut-il pour autant combattre Mahomet ou Bouddha ? Que valent des convictions qui ont besoin de limiter l’autre pour s’affirmer?» écrit le pasteur Claude Schwab dans 24 heures1.

On est loin de l’impératif d’évangélisation qui constitue «la mission essentielle de l’Eglise chrétienne et la responsabilité de chaque chrétien», comme le reconnaissait un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme en 19562. Le chrétien d’aujourd’hui ne vise plus la conversion du païen, du musulman ou du juif, il est déjà reconnaissant qu’on le laisse pratiquer sa religion en paix.

Face à l’invasion de populations certes pacifiques, mais inassimilables, l’Européen préfère regarder ailleurs, parce que, finalement, la religion, il s’en moque. Tant que les musulmans ne le dérangent pas dans sa douce quiétude, aussi longtemps qu’ils égorgent tranquillement et sans bruit des moutons dans leurs baignoires, tant que des muezzins ne diffusent pas des appels à la prière intempestifs par haut-parleurs à côté de chez lui, le chrétien passe son chemin.

Ce n’est évidemment pas lui qui va exiger l’érection de cathédrales en Arabie séoudite ou au Soudan puisque, à l’exemple du bon pasteur Schwab, il ne croit plus à rien.

Mais il n’aime pas les conflits et les «histoires», comme on dit en Pays de Vaud. Dès lors, il a peur que l’interdiction des minarets n’appelle des mesures de rétorsion économique des pays du Golfe, des attentats de la part des extrémistes ou la réprobation des nations bien-pensantes.

C’est effectivement un triple risque qu’une nation fière et indépendante doit assumer avec détermination. Car lorsqu’elle ne sera plus apte à résister à ces pressions, lorsqu’elle sera prête à verser cinquante millions de dollars à un tyran pour obtenir du pétrole et la libération de deux imbéciles, lorsqu’il faudra tolérer non seulement des minarets, mais des muezzins, qu’il faudra prier les autochtones de sortir des piscines pour permettre à nos hôtes musulmans de se baigner, lorsqu’on fixera les audiences des tribunaux ou les sessions d’examens en fonction du Ramadan… nous serons mûrs pour la dhimmitude, c’est-à-dire pour une sorte d’état de sujétion où l’occupant sera disposé à protéger nos personnes et nos biens, à condition que nous acceptions la loi islamique.

Ce n’est certes pas en acceptant l’initiative anti-minarets qu’on inversera la tendance actuelle à l’à-plat-ventrisme, mais ce pourrait être un signal opportun, pour toute l’Europe, contre l’invitation de la Turquie dans l’Union.

Je voterai OUI !

Claude Paschoud

1 24 heures du 4 novembre, page 22.

2 Arrêt Kokinakis.

Thèmes associés: Politique fédérale

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