Editorial
L’Etat de Vaud se soucie de sensibiliser la jeune population «à l'importance de consulter des informations journalistiques vérifiées et, in fine, leur permettre d'exercer leurs droits politiques en connaissance de cause». C'est ainsi qu'il a créé le nouveau média «Chek» qui ambitionne de proposer «une actualité locale, dynamique, vérifiée et positive», dans des formats adaptés pour les jeunes, c’est-à dire en recourant à un site internet et aux réseaux sociaux1.
On peut supposer que le titre du nouveau média est une subtile allusion au mot anglais check et garantit donc que le moindre élément des publications aura été vérifié à fond et en toute liberté.
Bien sûr, il y aura toujours de mauvais esprits pour se demander si un média financé par l’Etat peut vraiment jouir d’une réelle indépendance. Ils peuvent être rassurés, car Chek s’inscrit dans le cadre du programme de soutien à la diversité des médias du Canton de Vaud et la réalisation des contenus journalistiques est confiée aux rédactions des médias locaux actifs sur le territoire vaudois. Leurs contributions sont rémunérées par le biais de mandats de prestation, garantissant ainsi leur totale indépendance rédactionnelle vis-à-vis de l’Etat, qui se met également en retrait de la coordination éditoriale du projet2.
Tout cela est bien joli, mais l’indépendance d’un média ne se mesure pas seulement par rapport au pouvoir politique.
A qui fera-t-on croire que les «médias locaux actifs sur le territoire vaudois», Le Temps ou Le Courrier, par exemple, sont indépendants des idéologies à la mode, ne connaissent pas le parti pris et se livrent à des vérifications approfondies, alors qu’ils disent tous plus ou moins la même chose, défendent implicitement des causes, et se contentent le plus souvent de reprendre les informations des agences de presse?
Si l’Etat de Vaud est à ce point désireux de permettre aux jeunes gens de ce canton d’exercer leurs droits politiques en connaissance de cause, il devrait commencer par réintroduire dans les écoles des cours d’instruction civique dignes de ce nom, permettant aux élèves de se familiariser avec les institutions. Ce serait, certes, moins moderne qu’une vague éducation à la citoyenneté, mais ça aurait au moins le mérite de servir à quelque chose.
Et ce serait bien moins onéreux pour le contribuable qu’un Chek, qui, selon toute probabilité, ne sera lu que par ses contributeurs.
Mariette Paschoud
1 https://www.20min.ch/fr/story/vaud-le-canton-lance-chek-un-media-pour-les-jeunes-adultes-103196573.
Thèmes associés: Jeunesse - Médias - Politique vaudoise
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