Syrie: sac de noeuds

Le président des Etats-Unis cherche avec détermination tous les prétextes pour intervenir en Syrie.

Il a commencé par la proclamation absurde d’une prétendue ligne rouge qui devait marquer la limite de l’acceptable: le conflit avait déjà provoqué, de part et d’autre, cent mille morts, des centaines de milliers de blessés, un million de personnes déplacées sans ressources, mais ça, c’était encore tolérable pour autant que des armes chimiques ne soient pas utilisées!

Ces fameuses armes chimiques ont pourtant été utilisées pendant la guerre entre l’Iran et l’Irak, sans que les USA n’aient crié au franchissement d’une ligne rouge.

Miracle: le 21 août, des armes chimiques ont été utilisées. Par qui? On n’en sait rien, car il est très difficile d’enquêter sur place et les enquêteurs de l’ONU n’ont probablement pas la neutralité et l’indépendance qu’il faudrait. Ils n’ont d’ailleurs pas rendu leur rapport, à l’heure où j’écris ces lignes, ce qui n’empêche pas M. John Kerry, M. Barack Obama et M. Laurent Fabius, le guignol qui occupe en France le quai d’Orsay, d’affirmer que la responsabilité du président Bachar El Assad est indéniable.

Mais tout le monde ne veut pas se porter garant des mensonges de Pinocchio et porter de ce fait la responsabilité d’une troisième guerre mondiale. Mme Carla Del Ponte avait déjà proclamé début mai que des armes chimiques avaient été utilisées par les rebelles. L’enseignant belge Pierre Piccinin, qui vient d’être libéré après cinq mois de détention par les rebelles, affirme qu’il a surpris une conversation entre ses ravisseurs, indiquant que l’attaque au gaz sarin dans la banlieue de Damas avait été orchestrée par les rebelles comme une provocation «pour pousser l’Occident à intervenir militairement».

Le président syrien nie avoir utilisé des gaz et met ses contradicteurs au défi de prouver le contraire.

Je suis porté à le croire. M. Bachar El Assad ne peut avoir aucun avantage à gazer ses compatriotes, sachant que les Etats-Unis avaient clairement décrété qu’une telle attaque représenterait un casus belli et justifierait une intervention internationale contre le régime.

La conversation surprise par M. Piccinin est le reflet d’une thèse beaucoup plus plausible.

Les rebelles ont démontré leur incapacité à l’emporter sur le terrain, malgré le soutien logistique avoué des Américains, de l’Arabie séoudite, du Qatar et malgré l’appui plus discret de la Grande-Bretagne et de la France.

Ils ont besoin, pour renverser le président légitime et s’emparer eux-mêmes du pouvoir, d’une intervention armée de l’Occident.

Mais qui sont ces rebelles, et quel régime mettraient-ils en place à la chute de la famille Assad? Tout porte à croire que les insurgés sont une nébuleuse assez hétéroclite, constituée d’islamistes radicaux, de chiites et d’autres communautés qui ne manqueraient pas de se combattre entre elles, dès la chute de Bachar, comme on le voit aujourd’hui en Egypte et en Libye.

Les bons apôtres qui ont poussé à l’intervention occidentale clameront qu’ils n’avaient pas voulu cela et qu’ils ont poussé à l’extension de la guerre pour promouvoir la paix. On a déjà entendu les mêmes sornettes il y a septante-quatre ans.

Mais malgré l’intense lobbying des va-t-en guerre, inspirés par les milieux sionistes, une lueur d’espoir vient de naître: la proposition russe de contrôle des armes chimiques et de destruction de ces armes. Sitôt émise, la proposition fut vivement critiquée par les bellicistes, qui proclamèrent que le président syrien n’accepterait jamais une telle exigence.

Or, le locataire de la Maison Blanche avait peut-être un conseiller plus futé que les autres. Bachar accepte le contrôle et Obama repousse la consultation du Congrès. Le dindon de la farce est Hollande, parti sabre au clair en se croyant appuyé par les USA et la Grande-Bretagne et qui se retrouve tout seul et tout nu sous les lazzi.

Il existe un moyen simple de ramener la paix en Syrie. Il faut cesser de soutenir les rebelles, ne plus leur livrer aucune arme, aucun matériel, aucune subvention, et permettre ainsi au gouvernement légitime de rétablir l’ordre intérieur.

Claude Paschoud

Thèmes associés: Politique internationale

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