Mépris du droit
L'idéologie est un facteur de dissolution de la pensée, et cela se vérifie en particulier dans l'interprétation et l'application du droit. La directrice du FMI vient d'être reconnue coupable de négligence dans sa gestion du dossier Bernard Tapie, mais... sans peine prononcée! Qu'est-ce à dire? Qu'il y aurait eu effectivement délit? Cela ne se peut, car la caractéristique de toutes les infractions contre le patrimoine est d'être nécessairement intentionnelles. On ne peut, en effet, commettre ni un vol, ni une escroquerie, ni un abus de confiance, ni aucune autre infraction de cette nature par négligence. Si donc il y a eu, de la part de Madame Lagarde, effectivement négligence, le non-lieu s'imposait et l'acquittement public aussi! En procédant autrement, les juges de Madame Lagarde ont reconnu contre elle, sans aucun droit, une négligence.
Toute la presse aurait dû, si elle était respectueuse du droit à l'information du public, dénoncer l'arbitraire d'une telle sentence, visiblement dictée par des considérations exclusivement politiques et idéologiques. L'acquittement pur et simple était un droit de la personne arbitrairement poursuivie pour un délit qui n'existe pas. Ces juges, en donnant l'impression qu'il y avait tout de même délit, ont fait fléchir le droit. Quelle sécurité aurons-nous encore dans la loi interprétée par de tels magistrats? La question se pose désormais.
Second exemple: une femme ayant vécu quarante-sept ans avec son mari, homme violent nous dit-on, Jacqueline Sauvage, est très naturellement condamnée pour meurtre, les circonstances de celui-ci excluant la légitime défense. Cette personne est néanmoins graciée par François Hollande. Il n'est pas question ici de contester le droit de grâce présidentielle en France, héritage notoire de l'ancienne monarchie, mais cet héritage ne porte aucune atteinte à l'autorité judiciaire puisque la personne graciée demeure coupable. La grâce n'est pas un acquittement et ne porte nulle atteinte à l'autorité de la chose jugée.
Il n'empêche que, dans ce cas précis, la note idéologique féministe dénature l'exercice du droit de grâce. En effet, imaginons le cas inverse: un homme aurait tué sa femme parce que celle-ci lui aurait rendu la vie impossible durant quarante-sept ans. Qu'aurait-on entendu si cet homme, justement condamné pour meurtre, avait été gracié par un président de droite?
Par l'idéologie, on fait donc passer dans l'opinion tous les fléchissements du droit. Jacqueline Sauvage n'est-elle pas venue dire à la télévision, sur France 2, qu'elle ne se sentait pas coupable?
Un exercice aussi orienté de la grâce présidentielle n'est pas seulement dangereux. Il conduit peu à peu à la destruction d'une société, à la perte totale de confiance dans la protection qu'elle est censée respecter et maintenir de tous par une application non équivoque du droit.
La politisation de la justice par les magistrats eux-mêmes et celle du droit de grâce par le premier d'entre eux en France aura inéluctablement pour conséquence lointaine mais certaine, si elles persistent, à prononcer de fait la mort d'une société. En prendre conscience, c'est déjà combattre efficacement ce poison.
Michel de Preux
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