Aveu
On s'en doutait, mais ce n'était pas officiel: le service militaire obligatoire – sauf grave conflit de conscience ou inaptitude – appartient au passé, en dépit de l'article 59 de la Constitution fédérale.
Selon 20 minutes en ligne du 12 juin, «des experts seront mandatés pour moderniser la journée d'information de l'armée afin de motiver la génération Z pour le service militaire». En effet, «depuis plusieurs années, l'armée peine à avoir la cote auprès des jeunes. Avant même d'être conviés à la journée d'information, nombre d'entre eux ont déjà pris la décision de ne pas intégrer le service militaire». D'ailleurs, «il faut davantage se concentrer sur les besoins individuels des participants tout en prenant en compte les changements sociétaux et rester dans l'air du temps». Enfin, «la communication doit être continue et se faire digitalement. Whatsapp est envisagée comme option tout comme une présence renforcée sur les réseaux sociaux».
«Motiver», «avoir la cote», «rester dans l'air du temps», c'est-à-dire appâter les jeunes gens en âge de servir en les rassurant – vous verrez, vous pourrez porter des pantoufles de gym et dormir avec votre doudou –, en leur promettant des avantages personnels – ce que vous apprendrez à l'armée vous sera utile dans la vie civile, vous vous ferez des amis – et en évitant soigneusement d'évoquer la dure réalité, à savoir que l'armée est au service du pays et non pas des besoins individuels de chacun, que servir dans l'armée implique des qualités personnelles importantes et peut nécessiter un jour du courage, voire de l'héroïsme, et peut-être même le sacrifice de sa propre vie.
Je me demande parfois si un langage moins bisounours, plus viril et plus patriote – tout à fait compatible, d'ailleurs, avec une communication numérique – n'obtiendrait pas un succès plus grand auprès de jeunes gens à qui on propose pour tout idéal des chimères écologistes, des causes pseudo-antiracistes et des jeux vidéos.
Mais je dois rêver.
En tout état de cause, l'attitude et les choix de l'armée dans cette affaire ne permettront en rien d'améliorer le recrutement et serviront seulement à convaincre la «génération Z», c'est-à-dire les Suisses nés aux environs de l'an 2000, que les chefs militaires avouent ne plus croire eux-mêmes à la mission de l'armée suisse.
M. P.