Il faut rendre à César ce qui est à César
Chaque lecture du journal Réformés pourrait donner lieu à des articles pleins de dépit, d'agacement ou d'amertume. J'hésite toujours à ouvrir les pages, de peur que mes yeux ne brûlent devant quelque article païen, entre autres.
Le numéro 52 contenait un article sur Théo Buss et son parcours. Sans être laudatif, l'auteur éprouve, sans conteste, de la sympathie pour ce pasteur retraité et militant. Les hauts faits récents de ce monsieur sont notamment une participation aux activités d'Extinction Rébellion – cet essaim de bobets antisystème et écologistes.
L'article décrit M. Buss comme «indigné par toute forme d'injustice» et dénonçant «ouvertement les dérives du néolibéralisme». Notre bien-aimé journal donne la nette impression de soutenir les activistes. C'est à croire qu'il s'est trompé de public cible en glissant dans les boîtes aux lettres son contenu. Les réformés romands sont-ils une succursale d'un parti de gauche?
La politique a pour but de créer et maintenir le meilleur cadre possible pour le bonheur collectif et individuel. La religion chrétienne doit sauver les âmes et aide à comprendre la relation des hommes à Dieu. Quelle place y a-t-il pour des combats de société dans l'activité d'un ministre?
L'Eglise et l'Etat sont séparés depuis bien longtemps. Certaines époques ont connu sans succès des théocraties, mais l'incursion de l'Etat dans la religion n'a pas fait que des heureux non plus – leurs Excellences de Berne ont vu le départ de moult professeurs de l'Académie.
L'activité d'un ministre doit se fonder sur les Ecritures. «Il faut rendre à César ce qui est à César». Une première limite à l'activité d'un pasteur est le respect des autorités et des lois. Les exceptions, comme le terme l'indique, sont exceptionnelles et la marge de manœuvre est d'autant moins étendue que nous vivons dans un Etat de droit, avec des procédures, des voies de recours et le droit d'initiative.
Comment concevoir la nécessité de bloquer une rue à Zurich dans ce contexte? Le respect de la Création est tout à fait chrétien, certes. Plaider pour que le Gouvernement fédéral déclare «l'état d'urgence climatique» l'est-il encore? Les mesures pour la lutte contre le coronavirus ont provoqué des levées de boucliers et des désordres civils. User de coercition pour atteindre les objectifs climatiques aurait des répercussions bien pires. La politique deviendrait une dictature. La liberté serait encombrante, mais les citoyens verraient d'un mauvais œil la perte de leur confort et de leur choix en matière de consommation. Ce n'est pas en obligeant les bonnes gens que leur âme sera sauvée. Le résultat n'aurait rien de chrétien.
Ce pasteur retraité confond la fin et les moyens, s'il considère ses actions comme part d'un ministère. En effet, il est important de respecter la création du Seigneur, mais participer à contraindre les gens sort du cadre. Bloquer une rue crée du mécontentement, entretient un climat coercitif et n'a pas de valeur spirituelle.
Il est regrettable que le journal Réformés mette en avant un pasteur qui pratique la désobéissance civile. Mais doit-on s'en étonner?
Alcibiade
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