Editorial
Parmi les sujets sur lesquels se prononceront les citoyens suisses le 15 mai se trouve la reprise du règlement de l'Union européenne (UE) relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes – Frontex pour les intimes. On sait en effet que les membres de l'espace Schengen, dont la Suisse, sont censés reprendre les modifications apportées par l'UE aux règles qui régissent ledit espace, s'ils ne veulent pas s'en trouver automatiquement exclus. Or ces modifications peuvent faire chez nous l'objet d'un référendum. C'est ce qui s'est produit à propos de la nouvelle disposition, qui prévoit un renforcement des moyens de Frontex et, par conséquent, une augmentation de la participation financière et humaine de la Suisse à la protection des frontières extérieures de l'UE.
Il se peut que je n'aie pas poussé mes recherches assez loin, mais je n'ai trouvé nulle part les noms des membres du comité qui a lancé le référendum, ce qui empêche toute identification et tout «étiquetage» de ces gens. Tout au plus apprend-on sur le site https://frontex-referendum.ch/fr/ et grâce à son adresse postale que le comité référendaire appartient au mouvement Migrant Solidarity Network, ce qui est en soi tout un programme.
Au début de la campagne référendaire, le citoyen se voyait donc offrir le choix entre la vision des partisans du «non», défenseurs et promoteurs, au nom des «droits humains» et autres droits dits fondamentaux, d'une immigration quasiment libre, et celle d'autorités prônant le «oui», qui pensent que la défense des frontières extérieures de l'Europe est nécessaire à la limitation de l'immigration clandestine et au renvoi des «migrants» indésirables.
A première vue, donc, pour un esprit simple comme le mien, le bon sens penchait du côté du «oui». Certes, le chantage du Conseil fédéral menaçant les Suisses, en cas de victoire du «non», des pires conséquences économiques et administratives, auxquelles s'ajouterait l'abominable obligation de sortir leurs papiers d'identité pour être admis dans les pays de l'UE, me paraissait détestable, mais il y a des priorités et la défense des frontières en est une.
Toutefois, un événement est venu brouiller les cartes: la démission, le 28 avril, du directeur exécutif de Frontex, Fabrice Leggeri.
Dans le cadre de la votation, que M. Leggeri ait ou non procédé à des refoulements illégaux ou couvert des dysfonctionnements au sein de Frontex ne nous intéresse pas.
Ce qui nous intéresse, c'est la situation impossible dans laquelle s'est retrouvé cet homme, attaqué par les ONG pro-«migrants» et même par la Commission européenne, parce qu'il s'efforçait d'accomplir au mieux la tâche qui lui avait été confiée, à savoir empêcher les frontières européennes de se transformer en passoires. Avec la modification progressive de sa mission1 et l'obligation qu'on lui a faite de veiller à ce que les clandestins, loin d'être refoulés, soient accueillis dans le parfait respect des «droits humains» et autres droits dits fondamentaux, il ne savait évidemment plus à quel saint se vouer2.
«Entre l'impératif de ne pas laisser des gens passer irrégulièrement et, de l'autre, le principe de non-refoulement parce que toute personne en besoin de protection a droit à l'asile, comment fait-on? Personne n'est capable de me répondre. On est schizophrènes», aurait-il déclaré lors d'une table ronde tenue en décembre 2021.
Frontex n'est donc plus qu'un des nombreux protagonistes qui favorisent l'immigration clandestine en Europe.
Puisque, quel que soit le résultat de la votation du 15 mai, les frontières européennes extérieures seront des passoires, il vaut mieux renoncer à l'espace Schengen, en dépit des terrifiants inconvénients que brandit le Conseil fédéral, et veiller à ce que nos frontières soient bien défendues.
Je voterai «non».
Mariette Paschoud
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