Editorial

Le 30 novembre, les citoyens du canton voteront sur une modification de la Constitution cantonale visant à octroyer aux Vaudois de l’étranger le droit de vote et d’éligibilité pour l’élection au Conseil des Etats. Comme indiqué dans la brochure explicative, l’élection des membres du Conseil national est régie par le droit fédéral et celle des membres du Conseil des Etats par le droit cantonal. Les deux Chambres forment l’Assemblée fédérale, qui est l’organe législatif de la Confédération. Actuellement, les Vaudois de l’étranger peuvent participer à l’élection du Conseil national, mais pas à celle du Conseil des Etats. Le vote du 30 novembre vise à corriger cette incohérence.

Au-delà des possibles visées électoralistes, vingt-cinq mille électeurs supplémentaires à courtiser sont toujours bienvenus. Il n’y a pas de véritable raison de rejeter cette modification de la Constitution. Le coût de mise en œuvre est raisonnable, le matériel de vote étant acheminé avec celui des votations ordinaires. Il n’y a que le problème du second tour et des délais de retour qui peuvent poser quelques soucis logistiques, mais rien qui ne soit insurmontable. D’autre cantons romands le font déjà.

Mais élargissons un peu la réflexion. Choisissons un exemple au hasard, par exemple moi. Je suis un Suisse de l’étranger. Il y a dix-neuf ans, je suis parti vivre en Catalogne et il est probable que j’y resterai jusqu’à la fin de mes jours. Comme il n’existe pas de réciprocité, l’Espagne n’offre pas la possibilité pour les ressortissants de la Confédération de voter, ni au niveau communal, ni régional, ni national. Pour devenir un citoyen à part entière et pouvoir participer à la vie civique de mon pays d’adoption, j’ai demandé et obtenu la nationalité espagnole.

Mon dernier domicile en Suisse était dans le canton de Genève, j’avais la possibilité de demander d’y être affilié. Dans ce cas, j’aurais pu voter, en plus des sujets fédéraux, sur tous les sujets cantonaux, incluses les élections cantonales. Ignorant que le canton de Vaud n’offrait pas cette possibilité, j’ai choisi de m’y inscrire grâce à ma commune d’origine et n’ai donc pu voter que sur les sujets fédéraux depuis lors. Mais faisons un pas de plus: est-il même opportun de permettre aux expatriés de continuer à participer à la vie civique?

La logique démocratique veut que les citoyens prennent les décisions qui exerceront une influence sur leur cadre de vie. Pour les démocraties parlementaires, cela se limite à élire des représentants. Pour la Suisse, cela implique des choix sur des sujets concrets, plus ou moins importants en fonction de l’échelon. Les Suisses de l’étranger ont fait le choix de partir et, par là-même, il serait normal de leur retirer les droits que leur donnait leur citoyenneté. Mais chaque situation est particulière. Certains s’en vont sans un regard en arrière ni la moindre intention de revenir, d’autres pour une période limitée, en mission quelque part. Et comme la vie est imprévisible, les premiers seront peut-être de retour plus tôt que prévu et les seconds jamais.

Actuellement, pour pouvoir voter depuis l’étranger, il faut s’inscrire auprès du consulat suisse de son lieu de résidence. Il s’agit donc d’une démarche volontaire et pas automatique. Afin de continuer à participer à la prise de décision, le citoyen doit en faire la demande. Cela élimine de facto tous ceux qui n’y voient aucun intérêt. Et ceux qui font l’effort de solliciter le droit de continuer à voter démontrent une volonté de maintenir un lien fort avec la Suisse.

Quels qu’en soient les motifs, c’est une bonne raison de permettre à ces citoyens de voter. Le canton de Vaud pourrait d’ailleurs s’aligner, une fois n’est pas coutume, sur son voisin du bout du lac.

Michel Paschoud

Thèmes associés: Egalité, discriminations - Immigration - Politique vaudoise

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