L’ordre règne

«La reconnaissance faciale en temps réel est un outil efficace qui a permis plus de 1000 arrestations depuis début 2024», a assuré Mark Rowley, le chef de la police de Londres, qui prévoit de «plus que doubler son usage».

Cette phrase, tirée d’un article de presse paru durant l’été¹, figurait juste en dessous d’une photo dudit chef de la police londonienne. Nous nous souvenons de notre première réaction en le voyant: Ce type a une tête de nazi!

Réaction paradoxale. Le nazisme, autrefois, a pu exercer une certaine fascination sur quelques esprits contestataires, qui en retenaient surtout l’image stéréotypée de jeunes gens au regard droit et clair, aux cheveux courts, habillés de beaux uniformes: tout le contraire des militants gauchistes, hirsutes et loqueteux, traînant leurs médiocres pancartes «No war». Pourtant, aujourd’hui, nous nous sentons poussé à prendre de la distance par rapport à cette vision binaire. Nous détestons toujours autant le gauchisme, ses discours et ses attitudes; mais nous commençons aussi à éprouver un malaise croissant face à des «gardiens de l’ordre» impeccablement vêtus, au regard froid et au discours intraitable, chez qui on ne perçoit aucune humanité. Ils apparaissent comme des hommes-machines exécutant leurs missions sans aucun état d’âme, sans aucune distance critique et sans aucun sens de la mesure. Un brave policier anglais se réjouit de surveiller toute la population au moyen d’un système de reconnaissance faciale. Un brave employé communal vaudois inflige une amende démesurée à un retraité qui a par erreur jeté une bouteille en PET avec d’autres déchets plastique. Un brave contrôleur alémanique traite comme une resquilleuse une jeune fille qui prouve avoir acheté son billet avant de monter dans le train, mais qui n’a reçu la confirmation électronique que plusieurs minutes plus tard. De braves fonctionnaires nidwaldiens annulent les permis de séjour de deux sœurs thaïlandaises, cuisinières mondialement renommées et primées, engagées par un hôtel de luxe, à cause de leur échec à un test oral d’allemand. (Pendant ce temps, des légions de va-nus-pieds allophones, habilement conseillés par les avocats du lobby immigrationniste, peuvent s’établir en Suisse, voire y acquérir la nationalité.) De tels exemples foisonnent – et on pourrait rédiger un ouvrage entier rien qu’avec les sanctions démentes prononcées contre des humains au nom des droits des animaux. Nous vivons dans des zones d’anarchie où les règles sociales traditionnelles n’ont plus cours, mais où de nouvelles règles absurdes, idéologiques, liberticides ou simplement vexatoires sont appliquées sans discernement et avec une sévérité disproportionnée par de zélés agents de l’Etat. La répression n’a potentiellement aucune limite, mais on trouvera toujours de braves citoyens pour manifester leur approbation: «C’est bien fait, y’a qu’à respecter la loi!»

A l’heure où la folie, la bêtise et la méchanceté gangrènent toutes les couches des sociétés occidentales, nos certitudes passées sont durement remises en question: les fanatiques de l’ordre sont devenus aussi imbuvables que les adorateurs du désordre.

Pollux

¹ «Des millions de Britanniques ont leur visage scanné en temps réel», 20 minutes, 24 août 2025 https://www.20min.ch/fr/story/royaume-uni-les-britanniques-sous-surveillance-avec-la-reconnaissance-faciale-103402871.