Encore la procédure d'asile!

La Suisse est la destination préférée des étrangers qui espèrent bénéficier de sa procédure d’asile à la fois longue et généreuse. C’est pourquoi le nombre des requérants explose et les cantons peinent à trouver des centres d’accueil. Il fallait réagir.

Le Conseil fédéral a dès lors imaginé et le Parlement adopté des mesures urgentes destinées à accélérer les procédures, à encadrer les requérants d’asile «récalcitrants», à imposer aux cantons et aux communes des centres implantés dans des bâtiments ou installations appartenant à la Confédération, à exclure les demandes présentées dans nos ambassades ainsi que les requêtes des déserteurs.

Nos lecteurs savent depuis plusieurs années tout le mal que nous pensons de la loi sur l’asile de 1998 et de ses nombreuses modifications. La loi de 1979 était déjà affectée d’un vice rédhibitoire consistant à admettre qu’un étranger bénéficiait d’un droit subjectif à jouir du statut de réfugié, d’où qu’il vienne (et quel que soit le nombre d’Etats «sûrs» traversés par son voyage), pour autant qu’il réponde à certains critères d’exposition à de sérieux préjudices dans son pays d’origine ou de dernière résidence.

Comme on ne peut entrer en Suisse que par voie terrestre (en passant par des Etats réputés sûrs, qui sont nos voisins européens) ou par voie aérienne, à la condition d’être porteur d’un passeport, il en résulte qu’il devrait être impossible à un étranger sans papiers d’identité de se trouver sur notre territoire si nous avions conservé un contrôle aux frontières.

Les mesures urgentes imaginées par le Conseil fédéral ne s’attaquent qu’à l’écume du phénomène migratoire: on observera, sans doute, un fléchissement des requêtes, dans un premier temps, dû au renvoi immédiat des déserteurs, à l’impossibilité de déposer une demande dans une ambassade et à l’inconfort des centres fédéraux, voire à la cruauté des fonctionnaires chargés de déterminer qui est un «récalcitrant». Mais les centaines de milliers de malheureux du monde entier qui savent qu’en Suisse on est convenablement logé, nourri, soigné pendant des semaines, voire des mois ou des années avant la clôture définitive de la procédure vont continuer d’affluer, en passant par l’Italie ou par la Grèce et les Etats des Balkans.

Le comité référendaire nous annonce déjà sa sollicitude à l’égard des déserteurs syriens, censés être de braves démocrates persécutés par la dictature de l’affreux président Bachar El Assad. A n’en pas douter, ce ne sont pas seulement les racailles du Maghreb qui vont déferler, mais de vrais malheureux, chrétiens coptes d’Egypte, Maliens athées dès le départ des Français et autres ethnies persécutées. Pouvons-nous accueillir tous ceux qui se présenteront et qui, par hypothèse, seraient de vrais réfugiés au sens de l’art. 3 de la loi?

Sans doute pas. Alors, au lieu de continuer à gazouiller notre attachement aux traditions humanitaires, au respect des traités internationaux et de chanter notre devoir d’accueil, mettons en vigueur avec nos partenaires européens des mesures efficaces, ni Schengen, ni Dublin I et II, pour une politique de limitation des flux migratoires commune.

Il faudra voter «oui» le 9 juin, mais sans illusion. La question ne sera pas réglée pour autant.

Claude Paschoud

Thèmes associés: Politique fédérale

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