Hiérarchie et privilèges remis à l'honneur

PolluxLe Pamphlet n° 510 Décembre 2021

Les Finlandais covido-orthodoxes – et leurs compatriotes covido-hérétiques aussi, sans doute – sont fort mécontents. Leur jeune et charmante première ministre, juste après avoir appris que son ministre des Affaires étrangères avait été testé positif à ce que vous savez, est allée passer toute une nuit en discothèque, son frais minois parfaitement découvert. Elle s'en est ensuite excusée, en affirmant que son entourage lui avait laissé croire qu'elle n'était pas obligée de s'isoler.

Au même moment, on a appris que le président du conseil d'administration du Crédit Suisse, après son retour de Londres en jet privé, n'a pas voulu respecter la quarantaine de dix jours imposée à tous les voyageurs en provenance du Royaume-Uni. Après avoir vainement tenté d'obtenir un passe-droit des autorités suisses, il a décidé de passer outre et est reparti pour l'Espagne. Il a ensuite présenté ses excuses et exprimé ses sincères regrets d'avoir involontairement violé les règles.

Quelques semaines auparavant, nos voisins français s'étaient étonnés de découvrir une vidéo montrant leur premier ministre et leur ministre de l'intérieur, entourés d'autres élus, participant à une réunion où ils multipliaient les poignées de main, «sans masque ni respect des gestes barrières». De ce côté-ci du Jura, c'est notre conseiller fédéral en charge de la santé qui a été aperçu dans un train sans porter de masque.

On pourrait allonger sans fin la liste des personnalités publiques et autres personnes importantes qui esquivent les mesures de protection. Heureusement, on ne constate aucune hécatombe au sein des élites dirigeantes – ce qui pousse d'ailleurs les covido-sceptiques à prétendre que le méchant virus n'est pas aussi méchant qu'on le dit et qu'il est possible de continuer à vivre comme avant sans risquer une mort atroce. (On ne devrait pas le dire, mais cela se vérifie aussi chez un certain nombre d'individus lambdas qui continuent souterrainement de vivre comme avant avec leurs amis hérétiques.)

Pour notre part, nous retenons trois points positifs.

Le premier, c'est que ces élites dirigeantes ne succombent pas à la paranoïa sanitaire. Ces gens importants imposent des mesures de plus en plus dures et autoritaires au nom de la santé, mais eux-mêmes ne semblent pas inquiets pour leur propre santé. D'un certain point de vue, c'est rassurant: ce sont peut-être des salauds, mais pas des fous.

Second constat: le comportement de ces élites met en valeur la notion de hiérarchie. Face à une modernité qui ne jure que par le droit de codécision, par les assemblées citoyennes et par les collectifs autogérés, égalitaires et démocratiques, on voit ressurgir les notions d'élites et de prérogatives liées au rang social. Les personnes importantes font ce qu'elles veulent parce qu'elles sont importantes; elles ne sont pas obligées de se plier aux mêmes règles que le vulgum pecus. Et si ce dernier n'est pas content, on lui répond d'aller se faire voir. (Le doigt d'honneur est plutôt réservé aux personnes qui aspirent à accéder à un poste important, mais qui n'y sont pas encore parvenues.) On est donc là, vraiment, dans la tradition classique. Le monde ancien, avec ses dominants et ses dominés, est encore bien présent et les élucubrations égalitaires n'y sont que des répliques de pièces de théâtre.

Enfin, ces comportements ont indéniablement une valeur pédagogique. Aux jeunes qui glandent devant leurs consoles de jeux en ne sachant désespérément pas quoi faire de leur vie, on dit: Prenez-vous en main! Ayez de l'ambition! Gravissez les échelons pour devenir, vous aussi, des personnalités importantes! Vous pourrez alors enlever vos masques, faire la fête, voyager et même, peut-être, affirmer que vous êtes vaccinés sans que personne ne cherche à le vérifier.

Pollux

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