Police partout, justice nulle part
Il y a une vingtaine d'années, les contestataires gauchistes, fils à papa insuffisamment éduqués par leurs parents et intellectuellement frelatés par la trop longue fréquentation de l'université, saccageaient régulièrement les rues de la capitale vaudoise (et d'autres villes sans doute) en scandant et barbouillant ce slogan: «Police partout, justice nulle part.»
Il y avait alors moins de policiers qu'aujourd'hui, mais les citoyens se sentaient en sécurité dans les rues. Il y avait moins de vols, mais aussi et surtout moins d'agressions. On n'avait pas peur des gens que l'on croisait sur les trottoirs, qui n'étaient pas répugnants (ni les gens, ni les trottoirs). Les citoyens honnêtes n'avaient pas peur de croiser la police; au contraire, ils trouvaient cela plutôt rassurant. Dans les contrôles de circulation, un taux d'alcoolémie de 0,8 ‰ était toléré et les dépassements de vitesse jusqu'à 5km/h n'étaient pas sanctionnés. Personne n'avait encore été condamné à de la prison pour ses opinions politiques. La justice faisait peu parler d'elle.
Aujourd'hui, les contestataires de cette époque occupent de bonnes places dans la politique, l'administration ou parfois de grandes entreprises. Ils habitent de beaux appartements dans des quartiers chics, ou à la campagne. Les centres-villes sont devenus à certains endroits des cloaques dégoûtants et dangereux, en particulier le soir mais parfois aussi de jour. Les gens normaux sortent moins dès la tombée de la nuit, évitent certains quartiers, ou alors les traversent d'un pas rapide en rasant les murs pour éviter qu'un regard mal interprété les envoie à l'hôpital. Il y a davantage de policiers (notamment à la demande des partis de gauche!), mais les bandes ethniques ou éthyliques auxquelles ils font face les obligent à rester groupés et parfois à battre en retraite («pour éviter une escalade de la violence», expliquent ensuite les chargés de communication). Les incivilités mineures – insultes, coups, déprédations, trafics en quantité limitée – ne sont sanctionnées que lorsque cela est possible sans faire trop de vagues. En revanche, la délinquance non liée à l'affirmation culturelle d'une minorité est désormais sévèrement réprimée: dépassement de plus de 3km/h de la vitesse autorisée, non-respect du tri des déchets, divulgation d'opinions prohibées, etc. La justice, largement investie par des gauchistes militants et des poules mouillées de droite, veille principalement à ce que les criminels politiquement pardonnables soient pardonnés et les impardonnables dépouillés ou enfermés.
Le slogan «Police partout, justice nulle part» prend aujourd'hui tout son sens: ce n'était pas une description niaisement exagérée de la société de l'époque, mais un programme politique très sérieux.
Pollux
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