Pas de commentaire
Ceux qui critiquent le réseau internet au motif que celui-ci charrie des choses horribles ont tort: internet n'est que le reflet de la nature humaine et c'est donc à cette dernière que nous devons réserver notre opprobre. Il faut pourtant reconnaître que la «toile» a une fâcheuse tendance à mettre en évidence les qualités les moins reluisantes de nos congénères. C'est particulièrement le cas avec cette mode – apparue il y a quelques années lors de l'essor des blogs et étendue maintenant aux sites d'information – qui veut que les lecteurs puissent ajouter leurs propres commentaires à la suite de chaque texte régulièrement publié.
Cette pratique, hélas, révèle de manière effrayante le degré d'inculture, d'ignorance, de sottise, de bassesse ou de méchanceté de ceux que l'on se désole de devoir appeler ses concitoyens. La plupart des articles diffusés sur internet se trouvent ainsi affublés d'une liste plus ou moins longue de commentaires presque toujours consternants. L'orthographe pitoyable fait penser à la manière dont un auteur de bandes dessinées, dans les années 1960, imaginait ce que serait notre société au cinquante et unième siècle; nous avons un peu d'avance. Les phrases sont pataudes, mal construites, quelquefois incompréhensibles. Mais si la forme est déplorable, malhabile, rébarbative, c'est surtout le contenu qui est accablant.
Les «opinions» exprimées partent tellement dans toutes les directions que l'on ne peut même pas dire que ce soit un triomphe de la pensée unique. Certes, beaucoup de ces commentaires dégoulinent de conformisme, d'égalitarisme, de socialisme, de mondialisme, de républicanisme démocratique… Mais ce n'est de loin pas toujours le cas et l'on est surpris de voir apparaître, sous le couvert de l'anonymat, quantité de propos d'une rare incorrection politique. On ne saurait pourtant s'en réjouir, car ceux qui refusent ainsi de respecter les canons de la morale moderne ne se plient pas pour autant aux exigences de la logique, de la modération et de l'intelligence. Il arrive même qu'on ait honte de commentaires exprimant une position juste, mais pervertis par la faiblesse ou le mauvais goût de leur argumentation.
Finalement, on s'étonne de ce que tant de personnes désœuvrées réussissent à passer leurs journées à «intervenir» sur ce que les pédants appellent le «Web 2.0» – ou sites «interactifs». Un record a été atteint durant le récent incendie d'un local d'archives à Lausanne, lorsque deux factions – les anti-pompiers et les pro-pompiers – se sont furieusement apostrophées pendant plusieurs jours sur les pages internet du quotidien local, chacun répondant pour appondre, répétant inlassablement ses mêmes arguments afin d'avoir le dernier mot, à moins que ce ne fût dans l'espoir absurde de convaincre l'adversaire. Les «modérateurs» du site ne sont pas intervenus. Ils n'interviennent jamais, ni contre les idées défendues, ni contre les déclarations saugrenues, ni contre les attaques personnelles, ni contre les injures, ni contre les «trolls» – ainsi que l'on surnomme les commentateurs dont le seul but est de semer la pagaille sous des airs faussement innocents.
Ils ont raison. Si l'on sollicite les commentaires des visiteurs, autant ne pas les censurer ensuite. L'idéal serait de ne pas les solliciter et que les concepteurs de sites, abandonnant leur obsession de l'«interactivité», inventent un «Web 3.0» où l'expression publique serait réservée à ceux qui ont quelque chose à dire et qui savent le dire.
Pollux
Cette pratique, hélas, révèle de manière effrayante le degré d'inculture, d'ignorance, de sottise, de bassesse ou de méchanceté de ceux que l'on se désole de devoir appeler ses concitoyens. La plupart des articles diffusés sur internet se trouvent ainsi affublés d'une liste plus ou moins longue de commentaires presque toujours consternants. L'orthographe pitoyable fait penser à la manière dont un auteur de bandes dessinées, dans les années 1960, imaginait ce que serait notre société au cinquante et unième siècle; nous avons un peu d'avance. Les phrases sont pataudes, mal construites, quelquefois incompréhensibles. Mais si la forme est déplorable, malhabile, rébarbative, c'est surtout le contenu qui est accablant.
Les «opinions» exprimées partent tellement dans toutes les directions que l'on ne peut même pas dire que ce soit un triomphe de la pensée unique. Certes, beaucoup de ces commentaires dégoulinent de conformisme, d'égalitarisme, de socialisme, de mondialisme, de républicanisme démocratique… Mais ce n'est de loin pas toujours le cas et l'on est surpris de voir apparaître, sous le couvert de l'anonymat, quantité de propos d'une rare incorrection politique. On ne saurait pourtant s'en réjouir, car ceux qui refusent ainsi de respecter les canons de la morale moderne ne se plient pas pour autant aux exigences de la logique, de la modération et de l'intelligence. Il arrive même qu'on ait honte de commentaires exprimant une position juste, mais pervertis par la faiblesse ou le mauvais goût de leur argumentation.
Finalement, on s'étonne de ce que tant de personnes désœuvrées réussissent à passer leurs journées à «intervenir» sur ce que les pédants appellent le «Web 2.0» – ou sites «interactifs». Un record a été atteint durant le récent incendie d'un local d'archives à Lausanne, lorsque deux factions – les anti-pompiers et les pro-pompiers – se sont furieusement apostrophées pendant plusieurs jours sur les pages internet du quotidien local, chacun répondant pour appondre, répétant inlassablement ses mêmes arguments afin d'avoir le dernier mot, à moins que ce ne fût dans l'espoir absurde de convaincre l'adversaire. Les «modérateurs» du site ne sont pas intervenus. Ils n'interviennent jamais, ni contre les idées défendues, ni contre les déclarations saugrenues, ni contre les attaques personnelles, ni contre les injures, ni contre les «trolls» – ainsi que l'on surnomme les commentateurs dont le seul but est de semer la pagaille sous des airs faussement innocents.
Ils ont raison. Si l'on sollicite les commentaires des visiteurs, autant ne pas les censurer ensuite. L'idéal serait de ne pas les solliciter et que les concepteurs de sites, abandonnant leur obsession de l'«interactivité», inventent un «Web 3.0» où l'expression publique serait réservée à ceux qui ont quelque chose à dire et qui savent le dire.
Pollux
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