Les bouffons du politiquement correct
Une précédente chronique1 évoquait avec satisfaction l'honnête impartialité des débats organisés par La Télé Vaud-Fribourg, qui contraste agréablement avec le ton de la télévision d'Etat du bout du lac. La perfection n'étant pas de ce monde, il faut aussi signaler ici, parmi les rendez-vous phares de la nouvelle chaîne régionale valdo-fribourgeoise, les Bouffons de la Confédération, sketches de marionnettes largement inspirés des Guignols de l'info de la chaîne française Canal+ et adaptés à la sauce helvétique. On y retrouve chaque semaine quelques vedettes de la scène politique fédérale ou romande, tels que Pascal Couchepin, Micheline Calmy-Rey, Oskar Freysinger, Christian Levrat ou Daniel Brélaz, accompagnés d'autres têtes connues du monde du spectacle ou de la radio, sans oublier l'apparition régulière du grand Mouammar Kadhafi.
Oui, d'accord, c'est amusant, et c'est bien pour cela que l'on regarde… Mais on regarde avec agacement, car c'est terriblement orienté! Comme dans les Guignols de l'info, on y raille les politiciens de droite autant que les politiciens de gauche, les premiers parce qu'ils sont trop à droite et les seconds parce qu'ils ne sont pas assez à gauche. Tous en prennent pour leur grade, tous voient leurs petits et grands défauts tournés en dérision, mais avec des degrés d'irrévérence différents: avec les personnages censés représenter l'«extrême-droite», les scénaristes savent qu'ils ne risquent rien et ne s'imposent donc aucune limite, multipliant les insultes et les abjections.
Au moment de coucher ces réflexions sur le papier, nous voyons paraître la première édition de Vigousse, nouvelle tentative de lancement d'un journal satirique en Suisse romande après le défunt et peu regretté Saturne. Ce numéro un – qui était en quelque sorte un numéro zéro, dénomination qui lui aurait d'ailleurs mieux convenu – confirme hélas que les gens de gauche ont bien de la peine à être vraiment drôles tant l'humour, chez eux, prend un rôle militant et idéologique. Leur humour sert d'abord à rire le plus méchamment possible des adversaires détestés et à stigmatiser les idées honnies – quitte à les attribuer artificiellement à quelques protagonistes pâlots –, et ensuite seulement à ajouter quelques moqueries gentillettes, presque amicales, à l'égard des «amis».
Chez les humoristes politiquement corrects, le rire n'est jamais gratuit. Il ne se livre jamais pour la seule beauté du geste, pour le seul plaisir de décrocher des maxillaires ou de déchaîner des zygomatiques. Il y a toujours un message, une morale. C'est plus sérieux, et donc c'est moins drôle.
Pollux
1 Le Pamphlet n° 388, octobre 2009.
Oui, d'accord, c'est amusant, et c'est bien pour cela que l'on regarde… Mais on regarde avec agacement, car c'est terriblement orienté! Comme dans les Guignols de l'info, on y raille les politiciens de droite autant que les politiciens de gauche, les premiers parce qu'ils sont trop à droite et les seconds parce qu'ils ne sont pas assez à gauche. Tous en prennent pour leur grade, tous voient leurs petits et grands défauts tournés en dérision, mais avec des degrés d'irrévérence différents: avec les personnages censés représenter l'«extrême-droite», les scénaristes savent qu'ils ne risquent rien et ne s'imposent donc aucune limite, multipliant les insultes et les abjections.
Au moment de coucher ces réflexions sur le papier, nous voyons paraître la première édition de Vigousse, nouvelle tentative de lancement d'un journal satirique en Suisse romande après le défunt et peu regretté Saturne. Ce numéro un – qui était en quelque sorte un numéro zéro, dénomination qui lui aurait d'ailleurs mieux convenu – confirme hélas que les gens de gauche ont bien de la peine à être vraiment drôles tant l'humour, chez eux, prend un rôle militant et idéologique. Leur humour sert d'abord à rire le plus méchamment possible des adversaires détestés et à stigmatiser les idées honnies – quitte à les attribuer artificiellement à quelques protagonistes pâlots –, et ensuite seulement à ajouter quelques moqueries gentillettes, presque amicales, à l'égard des «amis».
Chez les humoristes politiquement corrects, le rire n'est jamais gratuit. Il ne se livre jamais pour la seule beauté du geste, pour le seul plaisir de décrocher des maxillaires ou de déchaîner des zygomatiques. Il y a toujours un message, une morale. C'est plus sérieux, et donc c'est moins drôle.
Pollux
1 Le Pamphlet n° 388, octobre 2009.
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